Stage en entreprise : ce que la loi va changer en 8 points clés

La proposition de loi relative au développement et à l'encadrement des stages a été adoptée en première lecture à l'Assemblée ce lundi 24 février 2014. Un texte qui vise à donner davantage de droits aux stagiaires. Les changements à venir pour l'entreprise.

Stage en entreprise : ce que la loi va changer en 8 points clés

L'Assemblée nationale a adopté, le 24 février 2014, en première lecture la proposition de loi relative au développement et à l'encadrement des stages. Un texte qui implique de nombreux changements pour les entreprises.

Pour une fois, l'ensemble de la gauche s'est unie pour voter de concert en première lecture à l'Assemblée nationale la proposition de loi relative au développement et à l'encadrement des stages. Chaque année, ce sont 1,2 million d'étudiants qui découvrent le monde de l'entreprise par le biais d'un stage. L'organisme d'accueil, qui prend en charge l'étudiant, doit alors se soumettre à un certain nombre de règles, que le texte est venu en partie modifier. L'enjeu de cette proposition de loi visait également à la simplification du droit puisque toutes les dispositions relatives au stagiaire ont été refondues dans le seul code de l'éducation. Les dispositions doivent encore être adoptées au Sénat. Le point sur les changements à venir.

1. Fin des stages de plus de six mois

La proposition vise à encadrer davantage la durée maximale d'un stage effectué par un étudiant dans une seule et même entreprise. Jusqu'à présent, l'article L612-9 du code de l'éducation fixait une limite de six mois, avec des exceptions. En effet, il restait possible de déroger à ce plafond dans deux cas bien précis :

– Lorsque le stagiaire interrompait momentanément sa formation pour exercer une activité visant exclusivement l'acquisition de compétences en liaison avec cette formation (ex : année de césure),

– Pour les stages prévus dans le cadre d'un cursus pluriannuel de l'enseignement supérieur.

Pendant les deux années qui suivront la promulgation de la loi, un décret viendra lister les cas pouvant justifier la présence d'un stagiaire pendant plus de six mois. Ensuite, il ne sera plus possible pour un étudiant de rester plus de six mois en stage au sein d'une même entreprise. Ce que Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur, a justifié devant les députés. "Si le stage est un volet de la formation, alors rien ne justifie qu'il dure plus de six mois car, au-delà de cette durée, sa pertinence pédagogique n'est pas démontrée. Dans certaines formations, les stages longs freinent le développement de l'alternance, dont la pédagogie est adaptée au temps plus long et le statut plus protecteur. Je souhaite d'ailleurs le doublement de l'alternance dans l'enseignement supérieur à l'horizon 2020."

2. Gratification obligatoire pour les stages de plus de deux mois

La question de la gratification des stages avait déjà été abordée dans le cadre de la loi Cherpion de 2011. À l'époque, la gratification des stagiaires avait été rendue obligatoire pour les stages de plus de deux mois. Montant: 12,5% du Smic (soit 436,05 euros) Cette fois, les députés ont souhaité préciser les dispositions actuellement en vigueur, évoquant certains abus de la part d'entreprises qui gratifiaient leurs stagiaires à partir du troisième mois de stage. L'amendement déposé par la rapporteur Chaynesse Khirouni vise donc à lever toute ambiguïté sur l'interprétation de l'article L612-11 du code de l'éducation (futur L124-6, ndlr) en obligeant les entreprises à rémunérer leurs stagiaires pour une convention de plus de deux mois.

3. Tickets-restaurant et frais de transport

Si les amendements du Front de gauche visant à accroitre la gratification des stagiaires ont tous été retoqués, celui portant sur l'accès pour le stagiaire au titres-restaurants ou au restaurant d'entreprise a été adopté. Cela signifie que si une entreprise dispose d'un restaurant, elle devra en assurer l'accès au stagiaire. À défaut, l'étudiant devra avoir droit aux tickets-restaurant, à la seule condition que l'entreprise y a effectivement recours pour ses employés. La participation patronale des titres restaurant ne peut dans ce cas être déduits de la gratification du stagiaire.

Il est à noter sur ce point que les titres restaurant sont pour l'employeur exonérés de cotisations patronales, sous deux conditions :

– 1/ La contribution patronale doit être comprise entre 50 % et 60 % de la valeur nominale du titre.

– 2/ Cette cotisation ne doit pas dépasser 5,33 € en 2014.

La même logique prévaut pour la prise en charge des frais de transport. L'employeur sera désormais tenu de prendre en charge une part du prix des titres d'abonnements souscrits par le stagiaire pour ses déplacements entre sa résidence habituelle et l'organisme d'accueil. Les conditions devront être fixées là encore par décret.

4. Limiter le recours aux stagiaires

Pour lutter contre le recours abusif de stagiaires dans l'entreprise, la proposition de loi prévoit de limiter le nombre de stagiaires dans l'entreprise. Ce plafonnement sera fixé par décret en Conseil d'État. Au cours des discussions, Geneviève Fioraso a été interrogée sur cette limitation. La ministre a fait savoir que celle-ci devrait s'établir sur la base d'un quota d'environ 10% du personnel de l'entreprise. Un nombre fixe de stagiaires devrait être établi pour les petites structures, afin de prendre en compte leurs spécificités.

Comme la loi le prévoyait actuellement, tout stagiaire devra être placé sous l'encadrement d'un tuteur. Ses tâches pourront être établies sur la base d'un accord d'entreprise. Pour éviter là encore tout abus, un décret sera là encore publié afin de limiter le nombre maximal d'étudiants pouvant être pris en charge par un seul et même tuteur.

5. Conditions de travail

L'employeur devra s'assurer que le stagiaire bénéficie des mêmes règles que les employés s'agissant de leur présence dans l'entreprise. Cette disposition vaut aussi bien pour le travail de nuit que pour le repos quotidien, hebdomadaire et les jours fériés. Dans une logique similaire, son temps de présence dans l'entreprise ne peut excéder celui des employés. La loi mentionnera clairement l'interdiction pour lui d'effectuer des "tâches dangereuses" dans le cadre de son stage.

6. Plus de contrôles de l'inspection du travail

La proposition de loi renforce les prérogatives des inspecteurs du travail pour le cas des stagiaires. Une procédure de sanctions spéciales a ainsi été consacrée dans le cas de manquements avérés de l'organisme d'accueil. Ainsi, l'autorité administrative pourra prononcer une amende de 2000 euros par stagiaire concerné par les manquements, et de 4000 euros maximum en cas de réitération dans un délai d'un an. L'inspecteur du travail se trouve par ailleurs habilité à informer le stagiaire, son établissement d'enseignement et l'organisme d'accueil en cas de manquement.

Sur le volet de la justice, si le tribunal des prud'hommes se retrouve saisi d'une demande de requalification d'une convention de stage en contrat de travail, il devra statuer dans un délai d'un mois.

7. Inscription du stagiaire dans le registre du personnel

Les entreprises devront eux aussi être intégrés dans le registre unique du personnel de l'entreprise, mais dans une partie spécifique. La loi Cherpion avait acté la mise en place d'un dispositif légèrement distinct, prévoyant l'inscription des stagiaires dans un registre dédié aux stagiaires, indépendant du registre des employés. Cette disposition n'avait toutefois pas été rendue obligatoire car l'ancienne majorité n'a jamais publié le décret d'application.

Cette disposition, là encore, vise à rendre plus transparent le recours aux stagiaires, et à faciliter la détection d'éventuels abus de la part d'employeurs.

8. Responsabilité accrue en cas d'accident du travail

L'Assemblée a également adopté un amendement du député Denys Robiliard afin de responsabiliser davantage l'organisme d'accueil en cas d'accident du travail, en cas de faute inexcusable de l'entreprise. Jusqu'à présent, l'organisme de formation devait supporter la réparation du préjudice subi par le stagiaire en cas d'accident du travail. L'établissement ne disposait d'aucun moyen de se retourner contre l'organisme d'accueil. L'article 7 de la proposition de loi introduit la possibilité d'une action récursoire en faveur de l'établissement d'enseignement. Il pourra donc désormais se retourner contre l'entreprise en cas de faute inexcusable de sa part.

 

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